samedi 21 mars 2009

Aya de Yopougon

Le Festival International de la BD d'Angoulême 2006 a décerné à Aya de Yopougon, tome 1, le prix du premier album —écrit par Marguerite Abouet et dessiné par Clément Oubrerie. Cette histoire à bulles en est maintenant, que je sache, à son quatrième volet. Elle fait montre d'un humour à tout casser.
Marguerite Abouet (Abidjan, 1971) nous a transmis ses motivations :
« Dans les années 1970, la vie était douce en Côte d'Ivoire. Il y avait du travail, les hôpitaux étaient équipés et l'école était obligatoire. J'ai eu la chance de connaître cette époque insouciante, où les jeunes n'avaient pas à choisir leur camp trop vite, et ne se préoccupaient que de la vie courante: les études, les parents, les amours… Et c'est cela que je veux raconter dans Aya, une Afrique sans les clichés de la guerre et de la famine, cette Afrique qui subsiste malgré tout car, comme on dit chez nous, ‘la vie continue‘... »
La vie d'Aya se déroule donc à Yopougon, "Yop City" ou "Poy", énorme quartier populaire à l'ouest d'Abidjan, en Côte d'Ivoire, qui est surtout connu pour la rue Princesse, où foisonnent les "maquis" (bars-restos popu) et les boîtes de nuit. C'est là, d'ailleurs, que se situent les lieux du film Rue Princesse, d'Henri Duparc.


Voici un extrait de l'article publié à propos d'Aya par Afrik.com :

Les héroïnes de Aya de Yopougon ont chacune choisi leur stratégie pour s’assurer un avenir. Et leurs tribulations font la part belle à des expressions très imagées à vous faire mourir de rire. « Même si un bouc veut une femme, il n’ira pas pleurer derrière une hyène », dit la sagesse populaire. Des expressions également inspirées de l’argot ivoirien dénommé nouchi. Un mélange de français, de langues locales et d’un vocabulaire crée de toutes pièces par la rue. Ainsi entre les « grotos » (messieurs d’un certain âge très fortunés, leurs alter égo plus jeunes, les « genitos » et les « freshnies » (les jolies jeunes filles), vous découvrirez un univers très tropical, mais qui n’a rien d’exotique. Les quelques anachronismes, auxquels seront seuls sensibles quelques uns d’entre vous, n’enlèvent rien à l’intérêt de cette histoire dont les personnages, hauts en couleurs, sont le reflet d’une époque, tout en étant très contemporains. Comme tous les jeunes de son âge et de tout temps, Aya et ses amis sont en bute à l’autorité parentale et les victimes (consentantes) de leurs élans amoureux.

Avec cet ouvrage, qui en prime vous propose un petit lexique du nouchi, vous montre comment préparer les frites de banane plantain (l’alloco, plat très apprécié en Côte de’Ivoire) et nouer le pagne, Marguerite Abouet est devenue une ambassadrice de la culture ivoirienne.

À propos de la Rue Princesse, Théophile Kouamouo écrit dans Le Français dans le Monde (nº 362, mars-avril 2009 ; page 42):
« Ce n'est qu'à la nuit tombée que la rue-souillon se met à mériter l'appellation qui l'a rendue célèbre : Rue Princesse. Les enseignes s'allument, tout aussi extravagantes les unes que les autres ; les « maquis » (…) dévoilent leurs visages ; des décibels s’échappent de partout de manière désordonnée, créant une joyeuse cacophonie ; des milliers de fêtards viennent de partout, y compris de l’orgueilleuse commune huppée de Cocody, fief de la bourgeoisie administrative locale et de la « zone 4 », quartier des nababs du business.
La Rue Princesse est, à Abidjan, le centre névralgique de « l’ambiance ». C’est le lieu de la revanche culturelle des gens de peu, de l’Afrique réelle, sur une élite occidentalisée et souvent enfermée dans des réflexes de mimétisme. C’est aussi un lieu de création trépidante, de
happening permanent. De la Rue Princesse d’aujourd’hui partent des rythmes musicaux, des « concepts » de danses urbaines, des inventions lexicales qui s’exporteront par la suite dans les night-clubs et les rues des autres métropoles africaines (…) »
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Quant au nouchi, ce français ivoiriennisé évoqué ci-dessus, il est très présent dans la musique ivoirienne et dispose de son site web, conçu notamment pour partager un sourire. Vous y trouverez de tout, y compris un dico ou des proverbes du type : « celui qui est sur le dos de l'éléphant ne doit pas craindre la rosée ».

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