Appelleriez-vous votre fils “Emmanuel Philibert” ? Oui ? Alors, vous habiterez difficilement Le Panier ou Barbès, par exemple, quitte à bien vouloir imiter une certaine classe en vue d'acquérir un capital symbolique vicaire, un drôle d'à peu près de statut. De toute façon, nous savons tous que le peuple n'est pas les people.
À quoi bon la question ? Voyons...
Baptiste Coulmont, sociologue à l'Université Paris-VIII (Saint-Denis), auteur de Sociologie des prénoms (La Découverte), tient blog et y présente les résultats de ses analyses sur la sociologie des prénoms, des religions et des sexualités. Série des prénoms, son billet récent sur les prénoms surreprésentés par série du bac hexagonal, a fait tout un tabac dans les réseaux sociaux et les média en France. Il y introduit les rapports qu'il a vérifiés entre la fréquence de certains prénoms et les séries du bac, qui préfigurent des études supérieures ultérieures ou l'accès à la vie professionnelle.
Nomen omen ? Pas exactement. On tient plutôt à penser que les prénoms renvoient à des origines et des classes —et leurs mouvances, leurs modes—, et que ce sont ces origines qui déterminent pour le plus grand nombre les choix concernant leurs études... ou l'absence de vraies possibilités à cet égard —bref, en quelque sorte, le sort. Autrement dit, mis à part les effets généraux, pour tous, des structures sociales, économiques et médiatiques, il y a des contraintes de désir et de possibilité relevant strictement du groupe auquel on appartient (y compris le sexe [1]). Laissons Coulmont s'exprimer :
Il s'est plu également à commenter les réactions à son billet. Cliquez dessus si cela vous intéresse.
[1] J'ai publié ce billet, court et modeste, et inséré cet extrait des travaux du sociologue Baptiste Coulmont parce qu'évidemment, je l'ai trouvé intéressant. J'espère qu'il encouragera d'autres réflexions et d'autres recherches. Quant au sujet des rapports sexe-vie professionnelle, extrêmement suggestif, voire intellectuellement aguichant, je vous propose comme apéro général un article de Jean Gadrey intitulé "Le Sexe du PIB", posté le jeudi 19 février 2009 dans son blog et repris en annexe du chapitre 1 d'un ouvrage postérieur que je conseille vivement : Adieu à la Croissance (Bien vivre dans un monde solidaire), Les petits matins/Alternatives Économiques, 2012 (1re édition, novembre 2010).
À quoi bon la question ? Voyons...
Baptiste Coulmont, sociologue à l'Université Paris-VIII (Saint-Denis), auteur de Sociologie des prénoms (La Découverte), tient blog et y présente les résultats de ses analyses sur la sociologie des prénoms, des religions et des sexualités. Série des prénoms, son billet récent sur les prénoms surreprésentés par série du bac hexagonal, a fait tout un tabac dans les réseaux sociaux et les média en France. Il y introduit les rapports qu'il a vérifiés entre la fréquence de certains prénoms et les séries du bac, qui préfigurent des études supérieures ultérieures ou l'accès à la vie professionnelle.
Nomen omen ? Pas exactement. On tient plutôt à penser que les prénoms renvoient à des origines et des classes —et leurs mouvances, leurs modes—, et que ce sont ces origines qui déterminent pour le plus grand nombre les choix concernant leurs études... ou l'absence de vraies possibilités à cet égard —bref, en quelque sorte, le sort. Autrement dit, mis à part les effets généraux, pour tous, des structures sociales, économiques et médiatiques, il y a des contraintes de désir et de possibilité relevant strictement du groupe auquel on appartient (y compris le sexe [1]). Laissons Coulmont s'exprimer :
Séries de prénoms
Billet publié le 30/03/2013
J’ai récupéré les résultats nominatifs au bac de 2012 (bac général et bac techno). Il est facile de repérer, à partir de ces résultats, qu’à certains prénoms sont associés des proportions de mentions spécifiques.
On peut aussi s’intéresser aux relations entre séries et prénoms. A chaque série est associée un groupe de prénoms surreprésentés (je n’ai gardé que les prénoms qui apparaissaient plus de 60 fois). Ainsi, les “Aliénor” représentent au total 2 candidates sur 10 000, mais elles sont 6 sur 10 000 candidates au bac “L” (littéraire) : elles sont 3 fois plus nombreuses à passer le bac “L” (littéraire) que ce qui est attendu à partir de leur nombre total. Et les prénoms diffèrent. Dans certaines séries (“S” et “STG” par exemple), ce sont des prénoms masculins qui sont surreprésentés… mais ce ne sont pas les mêmes : Augustin est plus fréquent en série S, Ahmed en série STG.
Le tableau suivant montre — pour quelques séries du bac — ces prénoms surreprésentés (12 par série). Ces prénoms “ont un air de famille” : Pierre-Louis est avec Pierre-Antoine; Yoann avec Yohan; Alison avec Allison et Alisson (dans la même liste que Stéphanie, Tiphanie et Tiffany) — mais bien séparées des Lison. Cet “air de famille” s’étend au delà de la proximité graphique : les prénoms “anglo-saxons” et “arabes” semblent associés à des séries différentes.
Georges Felouzis et ses collègues (Joëlle Perroton notamment) ont bien analysé la ségrégation ethnique et le rôle qu’elle joue dans la reproduction sociale : il s’est d’ailleurs appuyé sur un codage des prénoms pour repérer l’ethnicité revendiquée par les parents.
Ils s’intéressaient aux collèges, mais les séries du bac ne remettent pas a priori en cause cette ségrégation ethnique et sociale (ici, je m’intéresse simplement aux prénoms surreprésentés, et pas à la concentration).
Mise à jour :
- “Chaillot”, commentateur averti, m’a indiqué une erreur sur le tableau, que j’ai corrigé. Merci.
- La liste ne concerne pas les prénoms les plus fréquents par série, mais les prénoms surreprésentés relativement à l’ensemble de la population des candidats au bac (pour lesquels je dispose de résultats)
Il s'est plu également à commenter les réactions à son billet. Cliquez dessus si cela vous intéresse.
[1] J'ai publié ce billet, court et modeste, et inséré cet extrait des travaux du sociologue Baptiste Coulmont parce qu'évidemment, je l'ai trouvé intéressant. J'espère qu'il encouragera d'autres réflexions et d'autres recherches. Quant au sujet des rapports sexe-vie professionnelle, extrêmement suggestif, voire intellectuellement aguichant, je vous propose comme apéro général un article de Jean Gadrey intitulé "Le Sexe du PIB", posté le jeudi 19 février 2009 dans son blog et repris en annexe du chapitre 1 d'un ouvrage postérieur que je conseille vivement : Adieu à la Croissance (Bien vivre dans un monde solidaire), Les petits matins/Alternatives Économiques, 2012 (1re édition, novembre 2010).
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