Certains pensent qu'ils font un voyage, en fait,
c'est le voyage qui vous fait ou vous défait
(Nicolas Bouvier)
Curieux Voyageurs vient de fêter les 29, 30 et 31 mars son 40e anniversaire. Il s'agit d'un festival de films qui se tient à Saint-Étienne et qui se propose de conjuguer aventures, rencontres, découvertes, témoignages, émotions, poésie, traditions, passion, curiosité, jeunesse et folie, à en croire son clip bilan de cette année.
L’équipe du festival réunit des voyageurs passionnés amoureux de cinéma :
photographes, vidéastes ou carnettistes, les membres de CURIEUX VOYAGEURS rapportent de leurs voyages des moments pleins de couleurs et de musiques. D’autres voyageurs proposent leurs expériences à travers des créations : chaque année plus de 100 films ou expositions sont proposés en sélection et une quarantaine sont retenus qui font du festival CURIEUX VOYAGEURS une des plus prestigieuses manifestations françaises consacrées au document de voyage.En chiffres, le festival comporte aujourd'hui 16 000 visiteurs, 2 salariées, 36 organisateurs et 80 bénévoles.
Voici le palmarès des films récompensés par le jury de Saint-Étienne cette année 2019 :
– Grand Prix du festival : “Angkar” de Neary Adeline HAYC'est Nomad's Land - Sur les traces de Nicolas Bouvier (24 juillet 2008) le film qui m'a permis de découvrir ce festival stéphanois car il a reçu son Grand Prix en 2010.
– Mention spéciale du jury : “Le géographe et l’île” de Christine BOUTEILLER
Le prix Mention spéciale du jury exprime un “coup de cœur” ressenti par le jury
– Prix Ulysse : “Aventure cyclobalkanique” de Jean-Hugues GOORIS
Le prix Ulysse valorise l’aventure vécue par une personne ou une équipe
– Prix Terre des hommes : “Ka’apor, le dernier combat” de Nicolas MILLET
Le prix Terre des hommes valorise la démarche sociétale et/ou environnementale du film.
– Prix Complicité sans frontière : “je n’aime plus la mer” d’Idriss GABEL.
Le prix Complicité sans frontière valorise les thématiques “rencontres”, “partage” et “authenticité”.
Gaël Métroz (Liddes, Valais, Suisse, 1978), son réalisateur, était tombé fasciné par L'usage du monde, le célèbre ouvrage-culte du genevois Nicolas Bouvier (1929-1998) paru en 1963, à la Librairie Droz.
Dans l'entretien ci-dessous, Bouvier évoque ce récit qui retrace la première partie d'un voyage conçu pour respirer, pour sortir de l'abstraction des études, des murs d'une vie confortable et sédentaire, pour échapper au cadre qui vous détermine, pour devenir plus vulnérable et plus réceptif, dans le but de mieux comprendre la vraie vie humaine.
Il était parti à bord d'une petite Fiat Topolino avec son ami le peintre Thierry Vernet, auteur des illustrations du livre. Ses dessins et croquis d'une grande fidélité et d'une certaine rudesse mélangent le cocasse et le tragique, selon Bouvier.
Puis après deux ans de voyage ensemble en Yougoslavie, en Turquie, en Iran, en Afghanistan, au Pakistan et jusqu'à la frontière avec l’Inde, le jeune Bouvier a continué tout seul, jusqu'au Japon. Il avait 23 ans au moment de leur départ, à l'été 1953, il était de retour en Suisse à 27 :
Métroz, donc, fasciné par le récit de Bouvier et l'expérience qu'il comportait (comme le photographe Frédéric Lecloux, qui s'est mis en marche en novembre 2004, est retourné plus d'un an plus tard et a publié un album L'usure du monde en février de cette même année 2008), a choisi de suivre ses traces tout seul et de raconter son périple en images :
C'est devenu finalement un hommage au nomadisme ; Métroz l'explique :
Gaël Métroz persiste et, en 2016, a signé et présenté un nouveau film, Sadhu, au Festival Curieux Voyageurs. Il fait le portrait d'un sadhu, Suraj Baba, qu'il a rencontré au cœur de l'Himalaya et qui est devenu son ami ; il l'a suivi pendant plus d’une année.
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Mise à jour du 18 mai 2020 :
Nicolas Bouvier était aussi devenu photographe, au Japon, dans les années 50, puis iconographe. Deux bouquins récents en témoignent.
Le premier est un recueil de textes qui montrent sa conception de la photographie :
Nicolas Bouvier, Du coin de l’œil. Écrits sur la photographie, Héros-Limite, Genève, 2019, 224 pages, 14 euros.
Résumé de la librairie Eyrolles :
Le présent recueil réunit les textes que Nicolas Bouvier a écrit sur la photographie entre 1965 et 1996. A de nombreuses occasions, l'auteur genevois avait parlé de son métier d'iconographe, notamment dans le petit livre Le hibou et la baleine, paru en 1993, mais sa réflexion sur l'acte photographique restait à découvrir. Jusqu'à ce jour, les écrits qu'il a dédié à ce sujet (préfaces, articles de presse, introductions à des catalogues d'exposition) restaient dispersés. Près de quarante textes se trouvent ainsi rassemblés ici. Parmis eux, certains relatent également son activité de "chercheur-traqueur d'images", qui aura été son gagne pain durant près de trente ans. Il nous a paru intéressant de les reprendre ici, d'autant plus que quelques-uns de ces textes sont totalement inconnus et n'ont jamais été republiés.Le second ouvrage vient d'être publié par l'historien de la photographie suisse et professeur de l'Université de Lausanne Olivier Lugon :
Photographe à ses débuts (par nécessité), portraitiste (par accident), chroniqueur ("aliboron") : la photographie est une constante dans le parcours de l'écrivain voyageur. Nicolas Bouvier s'intéresse à la photographie parce qu'il entretient un rapport passionnel à l'histoire de l'estampe. Les images qu'il affectionne n'appartiennent jamais à la "grande" peinture classique mais toujours à l'art populaire. Dans les textes qui composent ce recueil, il est beaucoup question de ses tâtonnements : l'important pour l'écrivain étant d'élaborer une esthétique de l'effacement puis de se "forger une mémoire iconographique". Il tirera son enseignement de ses nombreux voyages et des recherches infatigables dans les bibliothèques du monde entier.
Olivier Lugon, Nicolas Bouvier iconographe, Infolio, Gollion (Suisse) - Bibliothèque de Genève, 2020, 160 pages, 26 euros.
Cliquez sur le lien ci-dessus pour accéder à un entretien avec Olivier Lugon.
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