mardi 24 octobre 2023

Gaza: martyre, auteurs, complices et récit

On est sur le plateau de BFMTV. Voici une tentative de coincement (lynchage ?) verbal à des fins de propagande ordinaire. Mais cette fois-ci, spoiler, elle va échouer.

C’était un 4 à 1, ou tous contre David Guiraud. 4 car il faut comprendre dans la claque un « journaliste » militant, con, faucon et négationniste : non seulement il montait un guignol visiblement déséquilibré, mais de surcroît, du premier abord, il y prendrait parti avec la pluralité contre l’individu et, promis, juré, très professionnel, feindrait de ne rien savoir (cf. 3' 33''), entre autres, sur le nettoyage ethnique que le Sionisme organise en Palestine depuis bien avant même la fondation d’Israël le 14 mai 1948, jour de la fin du « mandat » britannique sur la Palestine (1). 
David Amiel, Député Renaissance de Paris, y était aussi pour faire son cours de cynisme ordinaire, malgré cette maladresse pour un cynique qui vous empêche de piger l’ironie, voire les sarcasmes, du bouc émissaire choisi pour l’occasion —un représentant de LFI, qu’il vous faut comparer à Jean-Marie Le Pen, dont le parti, soit dit en passant, l'actuel RN, est justement votre allié parlementaire, ploutocratique, atlantiste, xénophobe, aporophobe et sioniste, et se trouve en de très bons termes, précisément, avec Mme Braun-Pivet (voir plus loin)—, un bouc émissaire auquel personne ne répond quand il pose très sérieusement la question du financement de Hamas, par exemple.
Ah, pompon et dérision totale, le poker moral comprenait même le Directeur de rédaction de Valeurs Poubelles pour que nous puissions assister au rare (jadis) spectacle de l’extrême-droite arabophobe taxant la gauche d’ « antisémite ».

Contexte. Le journaliste militant en bonnes manières et en bonne méthodes évoque un débat à l’Assemblée sur la situation dans le Proche Orient, « organisé au lendemain d’une nouvelle polémique déclenchée par Jean-Luc Mélénchon sur les réseaux sociaux » (pas par, « au nom de la représentation nationale », la « totale solidarité » et le « soutien inconditionnel » de Yaël Braun-Pivet au régime et à l’armée coloniaux sionistes : « La France soutient pleinement Israël, seule démocratie du Moyen-Orient, démocratie qui a été attaquée d’une façon terrible. Donc il ne faut pas se tromper, ni de combat, ni de mots », etc.) qui « a accusé Yaël Braun-Pivet de camper à Tel Aviv pour encourager le massacre à Gaza ». (« Pas au nom du peuple français ! », complétait Mélenchon, formulation impeccable s’il en est, YHWH merci). 
Le journaliste lance ensuite à David Guiraud une question rhétorique comme apéro de bienvenue : « Qu’est-ce qui lui prend à Jean-Luc Mélenchon, David Guiraud ? » 
Guiraud comprend qu’il est l’invité contraint de saluer le premier, de dire bonjour ! avant d’avoir à réagir à un venin si pressé, seule raison pour laquelle il est sur un plateau de BFMTV. « Chais pas, moi », répond-il serein et rêveur, songeant certainement à la meilleur manière de s’extraire de ce poison hasbara, ruminant (dommage, en vitesse) la répartie pur sarcasme adéquate pour se faire une contenance et aller aux faits : « Il est faux de dire que Madame Braun-Pivet appuie un massacre, Mme Braun-Pivet appuie un nettoyage ethnique, à Gaza. Elle, et tous ceux et celles qui à l’Assemblée nationale applaudissent, comme ça a été le cas le 10 octobre dernier, au soutien inconditionnel à Israël. Il y a 5 000 morts, sur la Bande de Gaza. » 
Et le chien de garde de rouspéter « c’est les chiffres du Hamas ! » Vu l’intensité, la constance et l’omniprésence du bombardement israélien, de la tonte de la pelouse gazaouie (Mowing the Lawn), il y en a peut-être plus, mais peu importe, car l’essentiel de l’Information, c’est de contrecarrer la vérité, d’empêcher qu’elle se répande, de l'étouffer dans l'œuf ! Bref, l’Information Libre et Plurielle (ILP), c’est le Négationnisme (jusqu'à l'apoplexieDrame historique, qui assassine qui ? Ou était-ce une amnésie globale transitoire ? Durable ? En fait, au service de ce Négationnisme ILP, on remarque une suite dans cet adamisme qui consiste à toujours vouloir nous faire croire que le monde n'existait pas avant telle ou telle date, que sais-je, le 24.02.2022 ou le 7 octobre 2023, par exemple). Un chien de garde comme il faut ne se demande surtout pas pourquoi l'armée israélienne, qui avait déjà tué 15 journalistes palestiniens en 10 jours —tradition délibérée—, n'autorise toujours pas la présence sur le terrain de la presse internationale. Un chien de garde comme il faut passe les notes de presse et les consignes de l’OTAN, des États-Unis, de Zelensky, comme d’Israël, de Tsahal (qui recenseretrouveretrouve des corps) ou des lobbies sionistes, un point, c’est tout. Un chien de garde comme il faut pose toujours la même question, celle qui vous détourne de la réalité et immunise Israël. Un chien de garde comme il faut boycotte les vrais arguments quand il les entend, abomination. En revanche, un honnête ami de son métier, comme l'israélien Yonatan Mendel, peut bien vous expliquer comment devenir journaliste israélien, et je vous assure que sa longue explication vaut le détour, y compris sur la langue des média de l'empire d'aujourd'hui : Viktor Klemperer aurait applaudi son analyse. Car ça fait peur, que d'exprimer des opinions dissidentes en Israël (2).




Cette fantochade télévisée illustre bien la cynique polyphonie monocorde, menteuse, antihistorique, lunaire, raciste et débridée qui campe dans nos média et qui constitue la pitance ordinaire que le régime nous réserve. Ces voix variées lançant les mêmes consignes par tous les moyens sont là pour contribuer à la fabrication du consensus de nos différents malheurs. Ici, elles s’insurgent contre le mot « camper », l’un taxe les habitants des quartiers pauvres d’ « armée de réserve des banlieues » (sans que les autres trouvent rien à redire) et tous s’évertuent à ignorer coûte que coûte la seule vraie armée de cette histoire, Tsahal, et, donc, ses crimes ; cette puissante armée qui pilonne et massacre à l’aide de milliers de grosses bombes un tout petit territoire trop densément peuplé : le journaliste militant négationniste feint même de ne pas savoir qu’il y a des milliers de Palestiniens assassinés parmi les décombres. 
En fait, quand Tsahal s'adonne à un massacre du bantoustan de Gaza, la presse française a une belle tradition de contorsions cyniques, comme le rappelait Pauline Perrenot en 2 018 dans une superbe analyse constamment en vigueur. Lorsque la répression et le meurtre ciblaient alors les Gazaouis, les média français parlaient tout au plus d'aveuglement de Monsieur Netanyahou. Ils vous expliquaient, par exemple, qu'il y avait eu un « sanglant bras de fer entre Palestiniens et Israéliens, terrible bataille de Gaza dont le bilan s'est élevé, un vendredi soir, à seize morts et quelques 1 400 blessés (dans une seule journée !)... sauf que... tous Palestiniens. Un bras de fer où tous les morts et blessés étaient du même côté. Mais rassurez-vous, comme il s'agissait d'un mouvement pacifique « conçu pour durer six semaines, les autorités israéliennes n'avaient pas de bonne solution. » « Si elles se contentaient de lacrymogènes et de balles en caoutchouc, elles risquaient qu’il y ait beaucoup plus de gens qui s’approchent de la frontière et essaient même de la franchir. Il n’y aurait alors pas eu seize morts mais un bain de sang d’une tout autre ampleur qui pouvait embraser la Palestine et placer Israël dans une position diplomatique encore bien plus difficile que celle qu’il affronte aujourd’hui. » 
Voilà pourquoi un bon gouvernement démocratique humanitaire se voit contraint de massacrer des terroristes presque tous les jours depuis 75 ans : de peur de n'avoir à les massacrer encore plus, ce qui constituerait un désastre diplomatique qu'il est compréhensible de tenir à éviter. Un terrible Guetta-pens.

Quant à la décision communautariste et gouvernementale (la Macronie, serait-elle séparatiste ?) de la présidente de l’Assemblée, Mme Yaël Braun-Pivet, qui joue après les vierges effarouchées, de camper, plantar sus reales, à Tel-Aviv aux frais des contribuables français pour soutenir le régime sioniste d’Israël, alors qu’il massacre avec un acharnement peu fréquent la population native de la Palestine, en effet, elle conforte le nettoyage ethnique et le génocide sionistes contre les Palestiniens. Par ailleurs, Mme souffle, à son escient, sur des braises qui causent des incendies en France, comme elle le fait, au demeurant, de façon incessante dans toute sorte de sujets.

Nos félicitations à David Guiraud, qui n’a jamais courbé l’échine dans ce pénible guet-apens audiovisuel et cloue les becs comme quatre. Je dis, tout à son honneur, qu’il était sur cet immonde plateau un véritable salopard, nom injurieux par lequel les soldats français désignaient les dissidents marocains aux ordres d’Abd-el-Krim.

Quant à Tugdual Denis, Directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles, à 10’04’’, il réussit l’inversion la plus réussie de cette vitrine de dégueulasseries quand il énormise : « ... et c'est une faute morale parce que c’est une inversion des valeurs, (…) c’est une faute morale puisqu’il y a une inversion des valeurs, aujourd'hui, il y a un attaqué et un attaquant, l’attaqué, c’est Israël et l’attaquant, c’est le Hamas... »
Quel exploit en combat et en mots ! Voilà, le nettoyage ethnique/massacre de Palestine date du 7 octobre 2023, ce sont les Israéliens qui le subissent et nous sommes nés de cette dernière pluie qui résonne maintenant, sans raisonner, à travers ma fenêtre. 

Bref : on tente de nous faire avaler la même pitance partout en Europe. À ce sujet, comme à d'autres, le déséquilibre "informatif" est toujours de 100 à 1 : il est fort difficile de contrecarrer une hasbara incessante disposant de tous les recours, de tous les écrans, de tous les média. Donc, encore heureux qu'il y ait parfois des invités dans certaines émissions qui, ayant un discours raisonné, différent de la doxa dominante, ne se laissent pas faire, tiennent bon, savent garder le sang froid et le verbe percutant, comme David Guiraud sur le plateau de BFMTV ou... Husam Zomlot, ambassadeur de la Palestine au Royaume Uni sur le plateau de la BBC il y a deux semaines :



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(1) Il faut insister, car il faut contrecarrer une propagande, un langage : ce n'est pas une guerre. Ce n'est pas une guerre Israël-Hamas. C'est un long nettoyage ethnique (parfois goutte à goutte), entraînant un génocide, organisé par le sionisme/Israël (bien avant la création de Hamas en 1987) contre la population native de Palestine, les Palestiniens. Ce nettoyage ethnique est quotidien et se produit là aussi où Hamas ne compte pas ou pas grand-chose. Voilà pourquoi on ne peut aucunement accepter des titres genre "Guerre Israël-Hamas : à la faveur de la guerre, les colons israéliens accélèrent le dépeuplement de collines de Cisjordanie" ("Des centaines de Bédouins palestiniens sont chassés de leurs terres. Une stratégie de déplacement orchestrée par les colons depuis 2017 et qui s’accélère de façon quasiment invisible depuis le 7 octobre." Le Monde, 21.10.2023), alors que le Sionisme d'abord, Israël ensuite, ne continuent à faire que ce qu'ils ont toujours fait depuis probablement 1929 (Ilan Pappe dixit), depuis notamment le 10 mars 1948, avec le plan Daleth ; sinistre prestidigitation, à l'aide ici du rideau de fumée que lui procurent ses milliers de bombes jetées sur la population enfermée, paupérisée et sans défense des 360 km2 de Gaza, cautionnées par les grands pouvoirs impériaux, économiques, militaires et médiatiques d'un Occident psychopathe, Israël intensifie la purge gigantesque qu'exige son plan colonial, raciste et inhumain.

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