Hélas, ayant maintenant beaucoup d'autres chats à fouetter, je n'ai pas le temps de m'arrêter un tant soit peu et d'écrire in extenso au sujet du titre que j'ai choisi pour ce billet. Ce n'est pas grave car ces derniers jours, j'ai été pris (d'assault) —les joyeuses déterminations de la liberté d'expression arrangent aisément ce genre de hasard— sous les tirs croisés (pitoyables contreparties constatées) de deux journaux du triomphant libéralisme heureux, Le Figaro et El País, qui nous procurent d'ordinaire des ravissements comme des globes.
Comme « Sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur », j'en ai retenu deux chroniques impeccablement complémentaires (car tout empire a ses provinces, où sévissent des proconsuls snobs) dont je vous fais part ci-dessous et qui ont la vertu d'illustrer passablement mon sujet sans ajout, pour l'instant, de beaucoup de commentaires.
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(1) Cf. à ce propos, très particulièrement :
— Domenico Losurdo : Contre-histoire du libéralisme, traduit de l’italien par Bernard Chamayou, La Découverte, Paris, 2013, 390 pages, 25 euros.
(2) Cf. à cet égard, parmi d'autres apports :
— Enrique Bernárdez : El lenguaje como cultura. Una crítica del discurso sobre el lenguaje, Alianza Editorial, 2008 (spécialement pages 47-84). Déjà cité ici.
— Charles Xavier Durand : If it's not English, it's not worth reading!, Current Issues in Language Planning 7/1, 2006; pages 44-60.
— Un billet sur Claude Hagège dans ce blog : Canal-U, ses vidéos éducatives, Hagège et la diversité des langues
Voici un extrait de l'introduction du texte de Durand :
Comme « Sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur », j'en ai retenu deux chroniques impeccablement complémentaires (car tout empire a ses provinces, où sévissent des proconsuls snobs) dont je vous fais part ci-dessous et qui ont la vertu d'illustrer passablement mon sujet sans ajout, pour l'instant, de beaucoup de commentaires.
Le Figaro (Par Armelle Bohineust. Mis à jour ) :
Aux États-Unis, l'informatique plus forte que les langues étrangères
Aux États-Unis, l'informatique plus forte que les langues étrangères
Cette chronique du Figaro est brève : n'hésitez pas à cliquer sur le lien pour la lire. On nous y apprend, entre autres, que...
(...) Désormais, au Texas, en Géorgie ou dans l'État de Washington, qui abrite le groupe Microsoft, un étudiant pourra prendre en option un langage informatique plutôt que le français, l'espagnol, l'allemand ou le japonais.
Réalité économique
La raison? «Beaucoup d'étudiants préfèrent apprendre un code informatique plutôt que conjuguer des verbes», explique Chris Reykdal, un représentant de l'État de Washington. Plus sérieusement, les partisans de cette nouvelle réglementation mettent en avant la réalité économique. «Apprendre un langage informatique est beaucoup plus utile pour trouver du travail et cela aidera les entreprises dans la compétition internationale», affirment-ils. (...)
Comprenez-vous ? Les étudiants, comme les sociétés en général, sont formatés par la "réalité économique" et ses propagandes et enfouissent toute velléité de vraie vie ou de vraie connaissance pour se plier en toute liberté à la tyrannie du marché de travail et sa soif de fadaises gang-reneuses. André Gorz le formulait très clairement dans L'immatériel - Connaissance, valeur et capital (Galilée, 2003) : « On reconnaît au capital le droit d'exiger que le développement des capacités humaines se fasse d'emblée en vue du parti que les entreprises pourront en tirer, donc (...) sous le contrôle de celles-ci. »
Quant à El País, il publiait aujourd'hui 7 avril —dans son supplément consacré à la Communauté de Madrid— une information qu'il faudrait nuancer longuement, mais qui parvient malgré tout à faire l'affaire...
Quant à El País, il publiait aujourd'hui 7 avril —dans son supplément consacré à la Communauté de Madrid— une information qu'il faudrait nuancer longuement, mais qui parvient malgré tout à faire l'affaire...
Notons que les dirigeants de la Communauté de Madrid emploient l'expression "bilinguisme" au lieu de dire ouvertement "anglais obligatoire", langue qui véhicule le catéchisme des "valeurs" —Aguirre dixit (1)— auxquelles ils sont foncièrement attachés et qu'il faut injecter à l'école. Voilà pourquoi ils tiennent absolument non à ce qu'on apprenne l'anglais, mais à ce qu'on apprenne en anglais. C'est une affaire de propagande dans un double sens : volonté de pénétration idéologique et snobisme dérivé d'un bouillon de culture accablant (2). En tout cas, l'obnubilation et la soumission sont servies tous azimuts, et ce serait à en parler plus longuement, j'insiste.La Escuela Oficial de Idiomas pierde 7.600 alumnos en solo dos años
El descenso del número de estudiantes en la región supone un 14,7%
Se produce después de que la Comunidad subiera las tasas un 166%
Frente a esta caída, la cifra de pupilos ha subido un 7% en toda España
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(1) Cf. à ce propos, très particulièrement :
— Domenico Losurdo : Contre-histoire du libéralisme, traduit de l’italien par Bernard Chamayou, La Découverte, Paris, 2013, 390 pages, 25 euros.
(2) Cf. à cet égard, parmi d'autres apports :
— Enrique Bernárdez : El lenguaje como cultura. Una crítica del discurso sobre el lenguaje, Alianza Editorial, 2008 (spécialement pages 47-84). Déjà cité ici.
— Charles Xavier Durand : If it's not English, it's not worth reading!, Current Issues in Language Planning 7/1, 2006; pages 44-60.
— Un billet sur Claude Hagège dans ce blog : Canal-U, ses vidéos éducatives, Hagège et la diversité des langues
Voici un extrait de l'introduction du texte de Durand :
“Political pressures to substitute a language by another can be brutal. (…) Today, the influence of political will on the choice of a foreign language earmarked for international communication is, in the respect, at least as important as the manipulation of people’s perceptions to accept it in its assigned role. Dictating linguistic policies clearly did not work in the Soviet republics ant, today, the resentment against Russia in this respect still runs very high. This is why the imposition of English as a second language in Europe today is coordinated with a number of measures aimed at making the targeted people accept it, as if it was the result of their own decision and depended only on their own free choice. English has to be first and foremost psychologically and sociologically acceptable if the political will to promote it is to succeed.”
(C. X. Durand, 2006)
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