mercredi 10 juin 2009

Dessins et cahiers d'Antonin Artaud à la Casa Encendida

Désolé, si vous ne l'avez pas encore visitée, il est trop tard maintenant : l'exposition Artaud, proposée du 3 avril au 7 juin à la Casa Encendida (en collaboration avec la Bibliothèque Nationale de France, le centre Georges Pompidou et le Musée Cantini de Marseille), n'est plus visible à Madrid. Elle comprenait notamment 35 cahiers inédits et bon nombre de desseins —documents à bien regarder pour comprendre ce qu'il y a dedans— tracés surtout en 1947, un an avant la mort d'un homme énormément créatif : poète, comédien, auteur et metteur en scène, plasticien... Pierrick Moritz a écrit une phrase très illustrative à propos d'Antonin Artaud (1896-1948) :
L’Œuvre d’Artaud, au même titre que celle de Nietzsche, ébranle les fondements d’une société qui s’est convaincue des croyances les plus absurdes ; un monde de cerveaux lavés éblouis par des imposteurs. Et cette société-là arrivera à bout de l’esprit récalcitrant qui la menace du chaos total. Et ceci d’autant plus facilement s’il est matériellement démuni.
Les dessins exposés à la Casa Encendida étaient en général des figures défigurées —préfigurant d'ailleurs les portraits dans la mȇme direction de Francis Bacon, vangoghien lui-aussi, que nous avons vus récemment dans le musée du Prado— d'une puissante prégnance.
Je vous laisse un échantillon de son génie plastique (le portrait du docteur Allendy) ainsi que deux extraits de cette bouleversante compilation d'articles, conférences et autres manifestes qu'est Le Théâtre et son double (1938; Gallimard 1964, dans l'édition dont je dispose), son texte majeur :


Le théâtre moderne est en décadence parce qu'il a perdu le sentiment d'un côté du sérieux et de l'autre du rire. Parce qu'il a rompu avec la gravité, avec l'efficacité immédiate et pernicieuse, —et pour tout dire avec le Danger. Parce qu'il a perdu d'autre part le sens de l'humour vrai et du pouvoir de dissociation physique et anarchique du rire. Parce qu'il a rompu avec l'esprit d'anarchie profonde qui est à la base de toute poésie.
(La mise en scène et la métaphysique, page 63)
On comprend donc que le théâtre, dans la mesure même où il reste en corrélation avec lui, doit rompre avec l'actualité, que son objet n'est pas de résoudre des conflits sociaux ou psychologiques, de servir de champ de bataille à des passions morales, mais d'exprimer objectivement des vérités secrètes, de faire venir au jour par des gestes actifs cette part de vérité enfouie sous les formes dans leurs rencontres avec le Devenir.
Faire cela, lier le
théâtre aux possibilités de l'expression par les formes, et par tout ce qui est gestes, bruits, couleurs, plastiques, etc., c'est le rendre à sa destination primitive, c'est le replacer dans son aspect religieux et métaphysique, c'est le réconcilier avec l'univers.
(Théâtre oriental et théâtre occidental, pages 107-8)
Merci, Dani, pour les photos.

2 commentaires:

albert a dit…

Impossible d'accéder au site (page d'accueil) de l'Aménagement linguistique dans le monde (Université Laval, Québec) J'ai tenté de le faire via leur adresse (http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/), mais j'aboutis à une impasse (blocage) alors que ce système fonctionnait parfaitement dans le passé.

Qui peut me renseigner?

Merci.

Albert

Alberto Conde a dit…

Tentez de rafraîchir la page en question dans votre navigateur, car je viens de vérifier que http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/ s'ouvre sans problème. Bonne chance.
A. C.