Candidat habituel au Nobel, Patrick Modiano vient de remporter ce prix célèbre et phénoménal. « Pour cet art de la mémoire avec lequel il a fait surgir les destins les plus insaisissables et découvrir le monde vécu sous l'Occupation. »
Il a été traduit parmi nous par plusieurs traducteurs, dont moi même, mais surtout par Maite Gallego. En Allemagne, son premier traducteur fut Peter Handke.
En France, Le Monde publia hier :
Ma version, Las Desconocidas, parut en 2001. Article, pas d'article, quel article dans le titre en castillan... ? Coup de cœur ou flair d'éditeur et lecteur éprouvé, Constantino proposa une volte-face car il trouva l'article défini féminin et pluriel "las" plus adéquat, plus narratif, disait-il, ce "des" renvoyant vraiment à "toutes". D'ailleurs, et sur ce point nous étions tous d'accord, il fallait éviter la conversion du substantif français en adjectif en castillan, risque encouru en cas d'absence d'article. J'y pense encore.
Puis je traduisis La Petite Bijou (Gallimard, 2001). Joyita parut en 2003.
Il suffit de lire ces deux ouvrages pour comprendre la volonté de Patrick Modiano de revendiquer les êtres anonymes (sans nom), plus concrètement (nouveauté chez lui), les (jeunes) femmes anonymes dont le cadre social, économique et atmosphérique que nous subissons ne fait qu'une bouillie. Modiano nous rappelait que les parias non seulement existent mais constituent paradoxalement la majorité, les vies communes.
Les gens du commun font des rêves mais sont régulièrement exclu(e)s du banquet des grands. Sans nom, ils font partie du nombre... C'est comme cela qu'on existe, par exemple, dans un Centre d'Internement pour Étrangers (CIE) en Espagne, où l'on accorde un numéro aux captifs. Ils n'y ont pas droit à leur nom. C'est ce numéro qu'il faut mentionner aux policiers si l'on veut être autorisé à rendre visite à un de ces innocents "retenus" par le système libéral.
Je ne crois pas aux prix, mais je respecte et apprécie Patrick Modiano. Mémoire du passé et du présent.
Bonne journée à tous.
______________________________
Demain, samedi 11 octobre, France Culture consacrera à Patrick Modiano ses émissions de 14 heures à minuit. Cliquez ici pour accéder au programme prévu. Il y aura même un spécial Modiano et la chanson à 19h sur Continent musiques.
Il a été traduit parmi nous par plusieurs traducteurs, dont moi même, mais surtout par Maite Gallego. En Allemagne, son premier traducteur fut Peter Handke.
En France, Le Monde publia hier :
L'auteur français Patrick Modiano a été récompensé par le prix Nobel de littérature « pour son art de la mémoire avec lequel il a évoqué les destinées humaines les plus insaisissables et dévoilé le monde de l'Occupation », selon les jurés, qui ont dit à la télévision publique suédoise que l'Académie n'avait pas réussi à joindre le lauréat avant d'annoncer sa victoire.En même temps, on pouvait lire sur le site du Nouvel Observateur un entretien avec Antoine Gallimard, son éditeur et ami, qui démarrait comme cela :
La carrière littéraire de Patrick Modiano a débuté en 1968 chez Gallimard, avec la publication de «la Place de l’Etoile». Ce jeudi 9 octobre, quarante-six ans plus tard, l’auteur de «Dora Bruder» a reçu le prix Nobel de littérature.Patrick Modiano est une vieille connaissance littéraire. Un jour, Constantino Bértolo, critique littéraire et éditeur, me confia la traduction pour Debate de Des Inconnues (Gallimard, 2000), un ensemble très cohérent de trois récits harmonieux. C'est drôle car nous avions eu une dizaine d'années auparavant notre première discussion littéraire à propos justement de Modiano et de son roman Dimanches d'Août.
Ma version, Las Desconocidas, parut en 2001. Article, pas d'article, quel article dans le titre en castillan... ? Coup de cœur ou flair d'éditeur et lecteur éprouvé, Constantino proposa une volte-face car il trouva l'article défini féminin et pluriel "las" plus adéquat, plus narratif, disait-il, ce "des" renvoyant vraiment à "toutes". D'ailleurs, et sur ce point nous étions tous d'accord, il fallait éviter la conversion du substantif français en adjectif en castillan, risque encouru en cas d'absence d'article. J'y pense encore.
Puis je traduisis La Petite Bijou (Gallimard, 2001). Joyita parut en 2003.
Il suffit de lire ces deux ouvrages pour comprendre la volonté de Patrick Modiano de revendiquer les êtres anonymes (sans nom), plus concrètement (nouveauté chez lui), les (jeunes) femmes anonymes dont le cadre social, économique et atmosphérique que nous subissons ne fait qu'une bouillie. Modiano nous rappelait que les parias non seulement existent mais constituent paradoxalement la majorité, les vies communes.
Les gens du commun font des rêves mais sont régulièrement exclu(e)s du banquet des grands. Sans nom, ils font partie du nombre... C'est comme cela qu'on existe, par exemple, dans un Centre d'Internement pour Étrangers (CIE) en Espagne, où l'on accorde un numéro aux captifs. Ils n'y ont pas droit à leur nom. C'est ce numéro qu'il faut mentionner aux policiers si l'on veut être autorisé à rendre visite à un de ces innocents "retenus" par le système libéral.
Je ne crois pas aux prix, mais je respecte et apprécie Patrick Modiano. Mémoire du passé et du présent.
Bonne journée à tous.
______________________________
Demain, samedi 11 octobre, France Culture consacrera à Patrick Modiano ses émissions de 14 heures à minuit. Cliquez ici pour accéder au programme prévu. Il y aura même un spécial Modiano et la chanson à 19h sur Continent musiques.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire