samedi 11 février 2012

Langue de bois et sacré culot de Masuch à Dublin

Dublin, le 19 janvier 2012.
Lors d’une conférence de presse de la Troïka UE (Istvan Szekely, de la Commission européenne, renforcé par Barbara Nolan), BCE (Klaus Masuch) et FMI (Craig Beaumont), Vincent Browne interpelle Klaus Masuch sur la légitimité du plan de sauvetage financier et les ravages qu'il entraîne. C'est-à-dire, cet insolite journaliste irlandais tient à savoir exactement pourquoi la BCE veut ratisser encore plus un perplexe peuple irlandais qui ne comprend toujours pas très bien pourquoi on lui demande de payer des milliards d’euros à des porteurs de bons ou obligations non garantis pour cause de dettes (d'une banque défunte) qui ne le concernent pas.
Cinq minutes suffisent à sortir du bois la profondeur et le rôle important de la langue de bois économique qu’on nous inflige. Cinq minutes suffisent à sortir du bois l’ouverture des discussions ouvertes et des débats encore plus ouverts en la matière. Cinq minutes suffisent à sortir du bois l’efficacité informative de l’expression corporelle et son déni d’une expression verbale effarante, qui balbutie des bourdes à son corps défendant. Désolé pour la gueule de bois concomitante.
Il se peut qu'il s'ensuive la parution d'un néologisme que je m'apprête à définir :
Masuchisme : Comportement des financiers orthodoxes persuadés que le peuple a besoin de ressentir de la douleur pour accomplir la jouissance sans entraves des membres de la Caste et qu'il finit toujours par obtempérer grâce à sa croyance en Santa Klaus.
[Note postérieure : une anacycle ou anacyclique est une expression dont la lecture à l'envers produit un autre sens. Mon ami Arturo me fait remarquer qu'en castillan Masuch égale Chusma. Et chusma veut dire racaille.]



Transcription du cafouillage central pur bois de Klaus Masuch :
Klaus Masuch: “(...) I can understand that this is a difficult decision to be made by the government and there’s no doubt about it but there are different aspects of the problem to be, to be balanced against each other and I can understand that the government came to, came to the view that, all in all, the costs for the, for the Irish people, for the, for the stability of the banking system, for the confidence in the banking system of taking a certain action in this respect which you are mentioning could likely have been much bigger than the benefits for the taxpayer which of course would have been there. So the financial sector would have been affected; the confidence of the financial sector would have been negatively affected, and I can understand that there were, that there was a difficult decision but that the decision was taken in this direction.”
Dans La dette ou le vol du temps, article publié par Le Monde diplomatique de février 2012, page 28, le sociologue et philosophe Maurizio Lazzarato nous rappelle un aveu peu conventionnel de la part d'un ministre des finances européen de cette époque particulièrement renflouante :
Peu avant son décès, l’ancien ministre des finances irlandais Brian Lenihan déclarait : « Dès ma nomination, en mai 2008, j’ai eu le sentiment que nos difficultés –liées au secteur bancaire et à nos finances publiques- étaient telles que nous avions pratiquement perdu notre souveraineté. » En appelant l’Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) à l’aide, poursuivait-il, « l’Irlande abdiquait officiellement sa capacité à décider de son propre destin » (The Irish Times, 25 avril 2011).
Et c'était lui qui les avait appelés. N'empêche, il savait que l'Irlande avait livré son destin à l'Empire du discours masuchiste et il l'admettait, tout près de la mort.

Enfin, dans ce même article, Maurizio Lazzarato nous prévient des dangers d'autres dettes qui commencent à jouir parmi les amis de Santa Klaus d'un solide prestige très bien induit par les libéraux et leurs média (de formation) de masse :
Aux États-Unis, par exemple, 80% des étudiants qui terminent un master de droit cumulent une dette moyenne de 77 000 dollars s’ils ont fréquenté une école privée et de 50 000 dollars s’il s’agit d’une université publique. Un étudiant témoignait récemment sur le site du mouvement Occuper Wall Street, aux États-Unis : « Mon emprunt étudiant s’élève à environ 75 000 dollars. Bientôt, je ne pourrai plus payer. Mon père, qui avait accepté de se porter garant, va être obligé de reprendre ma dette. Bientôt, c’est lui qui ne pourra plus payer. J’ai ruiné ma famille en essayant de m’élever au-dessus de ma classe. »
C'est l'un des témoignages cités par Tim Mak dans « Unpaid student loans top $1 trillion », 19 octobre 2011. Il y en a beaucoup d'autres : cliquez dessus, si cela vous tente, pour mieux comprendre la logique esclavagiste à laquelle vous acculent ces emprunts universitaires qu'on nous vend comme des panacées. Du coup, vous saisirez également peut-être pourquoi il faut que les masters soient presque obligatoires et... payants. Bien entendu, la première conséquence de la hausse des droits de scolarité, c'est d'extirper de l'enseignement supérieur bon nombre de candidats... pauvres. C'est ainsi qu'au Royaume Uni, par exemple, pays où les frais d'inscription se sont envolés, 10 % des "bacheliers" britanniques renoncent maintenant à aller à l'université, tandis que d'autres envisagent de partir, etc. : témoin The Guardian.

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