Stéphane, le mot qui suffit.
Stéphane Guérin à la porte de la Maison Rouge, Alcabón, le 28.08.11
Philologue, traducteur, jadis prof de français par temps d'anglobais obligatoire, désormais à la retraite (du travail, pas de la vie).
J'ai commencé à travailler sur ce site en avril 2005, mais il n'a été officiellement ouvert que le 1er août 2005.Si vous vous inscrivez sur Expressio, vous « serez informé chaque jour ou chaque semaine (selon votre choix) des nouvelles parutions et vous pourrez participer au forum lié à chaque expression ».
Amoureux des mots (comme quoi il n'y a pas forcément une totale incompatibilité entre une formation purement scientifique et d'éventuels penchants littéraires), il m'arrivait régulièrement de vouloir trouver l'étymologie ou la signification d'une expression de notre belle langue en voie de disparition.
Comme ce que je pouvais trouver sur le Net me satisfaisait rarement, je me suis décidé à démarrer avec un certain enthousiasme (curiosité personnelle, désir de partager...) les pages sur lesquelles vous êtes actuellement.
Mais comme j'ai aussi un certain nombre d'activités professionnelles, j'ai pris l'option d'en faire avancer le contenu lentement, à raison d'une nouvelle expression par jour (sauf les weekends), ce qui devrait m'occuper et vous maintenir en haleine pendant quelques années.
Peut-être d’abord parce que les télescopages produisent des effets par eux-mêmes, et que celui de la langue du théâtre classique avec tout son univers de raffinement grand siècle, et de l’absolue vulgarité du capitalisme contemporain se pose un peu là. On sait l’alexandrin propre à la pompe bossuétienne ou à la tragédie, mais on le sait également capable de faire rire, peut-être plus encore s’il est un peu trafiqué —et l’avantage n’est pas mince quand par ailleurs tout donne envie de pleurer. Appliquer une forme, connue pour accompagner les grands sentiments moraux, aux plus misérables manœuvres de la finance en capilotade est peut-être ainsi l’un des moyens de ne pas céder complètement au désespoir quand, précisément, on voit dans la réalité ces manœuvres outrageusement triompher. Les amis du monde comme il va se plaisent à voir dans l’exercice possible de la dérision le signe incontestable de nos merveilleuses libertés et de notre vitalité « démocratiques ». Mais c’est l’exact inverse ! Passé un certain degré de généralisation, la dérision devrait plutôt être prise pour un symptôme inquiétant, celui d’un stade de détérioration démocratique où, toutes les protestations étant vouées à rester ignorées, tous les médiateurs ayant cessé de médiatiser, tous les « représentants » ayant trahi la représentation, il ne reste plus à la masse des gouvernés que le parti d’en rire, parti désespéré, à qui la dérision, seule chose qui lui reste, est l’arme de tout dernier recours —avant peut-être de se retourner brutalement et d’en venir aux pavés. Ici, l’alexandrin prête toute son ambivalence : il bouffonnise à souhait et fait les Précieux ridicules, mais peut aussi se charger d’une nuée plombée et annoncer des orages.
(...)... Ce même conseiller rappellera plus tard que l'on ne saurait accabler indéfiniment le peuple :
Votre Premier ministre feint de vouloir des idées,
Je m'en vais à l'instant une ou deux lui donner :
D'abord mobiliser l'épargne nationale,
Et puis reprise en main de la Banque centrale.
Faire acheter la dette par tous nos épargnants
Est d'abord pour eux-mêmes un investissement,
Mais c'est aussi pour vous de la tranquillité :
Circonvenant ainsi l'empire des marchés
Vous êtes affranchis de toutes leurs foucades,
De leurs diktats ineptes, enfin de leurs brimades.
Vous n'avez qu'à choisir : la finance vorace,
Ou bien à l'opposé l'épargne-carapace.
Faisant des citoyens vos nouveaux souscripteurs,
Les marchés, à la porte, ne font plus leur malheur.
(...)Enfin, sous le balcon du pouvoir, on verra le peuple en pétard, car...
Alors que la finance était bonne à mater,
Vous n'avez rien fait d'autre que la réarmer.
Le bourreau s'est changé en une providence,
Prenez quelque recul, observez la séquence :
Crise de la finance, sauvetage public,
Explosion de la dette et rigueur hystérique.
Et comme d'habitude, à qui va l'addition ?
Qui doncque de la farce pour être dindon ?
Le peuple a le dos large, la chose est entendue,
Attention tout de même qu'accablé il ne rue.
Salarié, licencié, contribuable, usager,
De toutes ces façons de le faire banquer,
Il en est peut-être une qui est celle de trop.
Ce jour-là inutile de crier au complot,
À moins de penser à celui que vous armâtes
Et dont vous fîtes tout pour qu'enfin il éclate.
(...)De quoi envisager un drôle de chiasme comme conclusion de cette fable ubuesque : des « merdre ! » futurs remplaceraient les futures et leurs excréments spéculatifs. Car l'histoire a ses relèves.
La colère du peuple est comme un réservoir,
Longtemps se remplissant sans rien laisser voir,
Et puis un jour soudain vient le litre de trop
Qui fait rompre la digue et libère les eaux.
Dans l'ancienne poésie française, il était loisible au poète de placer à l'hémistiche un mot à terminaison féminine ; mais dans ce cas, la syllabe muette était surabondante et ne comptait pas.Pour en savoir plus, cliquez sur le lien ci-dessus.
On aurait pu dire alors :
1 2 3 4 5 6 1 2 3 4 5 6
Oui, je viens dans son temple célébrer l'éternel.