L'écrivain français J.-M.-G. Le Clézio (Nice, 1940) va présenter à Madrid son dernier roman Bitna, sous le ciel de Séoul.
Ce sera le mercredi 6 mars, à 19h, dans l'Espace Fundación Telefónica (Calle de Fuencarral, 3). L'entrée est gratuite et il sera accompagné de l'écrivaine et journaliste espagnole Berna González Harbour. On disposera d'un service de traduction simultanée français-castillan à travers une application pour portable (Olyusei).
Le Clézio a l'habitude de rouler sa bosse un peu partout et de projeter ses bourlingues sur ses ouvrages. Il arrive que je connais bien une partie de ses bouquins —dont j'ai traduit deux, Désert et Onitsha— et j'ai décidé donc d'aller le voir avec un groupe de mes élèves.
Le Clézio reçut le prix Nobel de Littérature en 2008. Pour l'écouter un peu plus à l'occasion de la présentation de son roman en castillan, traduit par Amaya García Gallego et María Teresa Gallego Urrutia, et éditée par Lumen, je vous propose de visionner cet entretien qu'il tint à Bordeaux en 2018 :
“Probably, one of the most important challenges
we are facing is not to equate Zionism and Judaism,
as Israel want us to do. I think that the more
we’ll dissociate the both, Zionism and Judaism,
the more we can challenge the Propaganda,
and the whole accusation of anti-Semitism would not be effective.” [Probablement, l’un des défis les plus importants auxquels il nous faut faire face, c’est de ne pas faire une équation entre le Sionisme et le Judaïsme, comme Israël voudrait qu’on le fasse. Plus nous arriverons à dissocier le Sionisme et le Judaïsme, plus nous pourrons défier la Propagande, et toute l’accusation d’antisémitisme ne serait plus efficace.] Ilan Pappé, septembre 2016.
[Ici, il faudrait une intro. Elle est peut-être en chantier, mais vu l'énormité de l'abjection, du cynisme et de la volonté de répression —réels et ressentis— des professionnels de l'amalgame, il y a urgence à favoriser la réflexion, à proposer la sérénité de Sand et de Collon —cf. un peu plus bas.
Cela fait longtemps que le pouvoir en France a choisi le lobby sioniste israélien, le colonialisme, contre la cause du peuple palestinien, la victime. L'usage que l'on a toujours fait de l'expression "antisémitisme" est inexact, philologiquement abusif, historiquement malveillant, racisant, donc raciste, politiquement opportuniste ; cette espèce de synecdoque biblique constitue une appropriation indue. Fils de Noé, Sem était un personnage de la Genèse, le premier des cinq livres du Pentateuque, donc, de la Torah. Et mis à part que les races n'existent pasbiologiquement (cf. aussi Albert Jacquard), que tous les racisants ("Ça se voit ! Le type, il n’a pas les mots d’un gitan. Il n’a pas les mots d’un boxeur gitan.") sont racistes, que tous les racismes sont misérables, insupportables, et que le régime sait toujours appliquer deux poids deux mesures à leur égard, rappelons que le terme "sémitique" relève de la Linguistique, de la Philologie. Le dictionnaire n'est pas très précis, mais en annonce la couleur. J'appelle "Judéophobes" les racistes qui détestent les "Juifs" (y compris beaucoup de descendants de Juifs qui ne se tiennent pas pour des Juifs). Évidemment l'analyse du terme "Juif", de cette identité multiple, a déjà mérité plusieurs livres. Sont judéophobes les misérables qui vandalisent des cimétières juifs et y inscrivent des croix gammées, ce symbole écœurant.
En ce qui concerne le Sionisme, on pourrait lire tant de choses... Mais puisqu'il faut en choisir une en vitesse, je vous conseille LTI (Lingua Tertii Imperii, Die Sprache des Dritten Reiches, La Langue du IIIe Reich), les notes d'un philologue juif à Dresden, concrètement le chapitre XXIX, justement intitulé Sion. Victor Klemperer lut les œuvres de Hertzl sous la botte nazie, clandestinement. Et après lecture, il écrivit (extrait de la traduction castillane d'Adan Kovacsics éditée par Minúscula, Barcelona 2001) :
Los leí con una consternación rayana en la desesperación. Mi primer apunte en los diarios sobre el tema reza así: "¡Señor, protégeme de mis amigos! Si uno posee la voluntad necesaria, encontrará en estos dos volúmenes pruebas de lo que Hitler, Goebbels y Rosenborg alegan contra los judíos, no se necesita una enorme habilidad para interpretar y distorsionar los hechos."
Más tarde, apunté algunas citas y palabras clave para determinar las semejanzas y desemejanzas entre Hitler y Herzl. Porque, gracias a Dios, también había desemejanzas.
Si toute expression antijuive dans le monde ne cesse de m’inquiéter, j’éprouve un certain écœurement face au déluge d’hypocrisie et de manipulations orchestré par tous ceux qui veulent désormais incriminer quiconque critique le sionisme.
Bien que résidant en Israël, « Etat du peuple juif », j’ai suivi de près les débats, en France, sur : antisémitisme et antisionisme. Si toute expression antijuive dans le monde ne cesse de m’inquiéter, j’éprouve un certain écœurement face au déluge d’hypocrisie et de manipulations orchestré par tous ceux qui veulent désormais incriminer quiconque critique le sionisme.
Commençons par les problèmes de définition. Depuis longtemps déjà, je ressens un malaise non seulement face à la récente formule en vogue : «civilisation judéo-chrétienne », mais aussi face à l’utilisation traditionnelle du vocable : « antisémitisme ». Ce terme, comme l’on sait, a été inventé dans la seconde moitié du 19ème siècle par Wilhelm Marr, nationaliste-populiste allemand qui détestait les juifs. Conformément à l’esprit de cette époque, les utilisateurs de ce terme tenaient pour présupposé de base l’existence d’une hiérarchie des races dans laquelle l’homme blanc européen se situe au sommet, tandis que la race sémite occupe un rang inférieur. L’un des fondateurs de la« science de la race » fut, comme l’on sait, le français Arthur Gobineau.
De nos jours, l’Histoire un tantinet plus sérieuse ne connaît que des langues sémites (l’araméen, l’hébreu et l’arabe, qui se sont diffusées au Proche Orient), et ne connaît, en revanche, nulle race sémite. Sachant que les juifs d’Europe ne parlaient pas couramment l’hébreu, qui n’était utilisé que pour la prière, (de même que les chrétiens utilisaient le latin), il est difficile de les considérer comme des sémites.
Faut-il rappeler que la haine raciale moderne envers les juifs constitue, avant tout, un héritage des églises chrétiennes ? Dès le quatrième siècle, le christianisme s’est refusé à considérer le judaïsme comme une religion légitime concurrente, et à partir de là, il a créé le fameux mythe de l’exil : les juifs ont été exilés de Palestine pour avoir participé au meurtre du fils de Dieu ; c’est pourquoi, il convient de les humilier pour démontrer leur infériorité. Il faut pourtant savoir, qu’il n’y a jamais eu d’exil des juifs de Palestine, et, jusqu’à aujourd’hui, on ne trouvera pas le moindre ouvrage de recherche historique sur le sujet !
Personnellement, je me range dans l’école de pensée traditionnelle qui se refuse à voir les juifs comme un peuple-race étranger à l’Europe. Dès le 19ème siècle, Ernest Renan, après s’être libéré de son racisme, avait affirmé que : Le juif des Gaules… n’était, le plus souvent, qu’un Gaulois professant la religion israélite. » L’historien Marc Bloch a précisé que les juifs sont : « Un groupe de croyants recrutés, jadis, dans toutle monde méditerranéen, turco-khazar et slave ». Et Raymond Aron d’ajouter : « Ceux que l’on appelle les juifs ne sont pas biologiquement, pour la plupart, des descendants des tribus sémites… ». La judéophobie s’est, cependant, toujours obstinée à voir les juifs, non pas comme une croyance importante, mais comme une nation étrangère.
Le lent recul du christianisme, en tant que croyance hégémonique en Europe ne s’est pas accompagné, hélas, d’un déclin de la forte tradition judéophobe. Les nouveaux « laïcs » ont transformé la haine et la peur ancestrales en idéologies « rationalistes » modernes. On peut ainsi trouver des préjugés sur les juifs et le judaïsme non seulement chez Shakespeare ou Voltaire, mais aussi chez Hegel et Marx. Le nœud gordien entre les juifs, le judaïsme et l’argent semblait aller de soi parmi les élites érudites. Le fait que la grande majorité des millions de juifs, en Europe orientale, ait souffert de la faim, et ait vécu en situation de pauvreté, n’a absolument pas eu d’effet sur Charles Dickens, Fiodor Dostoïevski, ni sur une grande fraction de la gauche européenne. Dans la France moderne, la judéophobie a connu de beaux jours non seulement chez Alphonse Toussenel, Maurice Barrès et Edouard Drumont, mais aussi chez Charles Fourier, Pierre-Joseph Proudhon, voire, pendant un temps, chez Jean Jaurès et Georges Sorel.
Avec le processus de démocratisation, la judéophobie a constitué un élément immanent parmi les préjugés des masses européennes : l’affaire Dreyfus a fait figure d’événement « emblématique », en attendant d’être surpassée, et de loin, par l’extermination des juifs durant la seconde guerre mondiale. C’est entre ces deux événements historiques qu’est né le sionisme, en tant qu’idée et mouvement.
Il faut cependant rappeler que jusqu’à la seconde guerre mondiale, la grande majorité des juifs et leurs descendants laïques étaient antisionistes. Il n’y avait pas que l’orthodoxie, forte et organisée, pour s’indigner face à l’idée de précipiter la rédemption en émigrant vers la Terre Sainte ; les courants religieux plus modernistes (réformateurs ou conservateurs), s’opposaient aussi vivement au sionisme. LeBund, parti laïque en qui se reconnaissait la majorité des yiddishophones socialistes de l’empire russe, puis de la Pologne indépendante, considérait les sionistes comme des alliés naturels des judéophobes. Les communistes d’origine juive ne perdaient pas une occasion de condamner le sionisme comme complice du colonialisme britannique.
Après l’extermination des juifs d’Europe, les rescapés qui n’avaient pas réussi à trouver à temps refuge en Amérique du Nord, ou en URSS, adoucirent leur relation hostile au sionisme, alors même que la majorité des pays occidentaux et du monde communiste en venait à reconnaître l’Etat d’Israël. Le fait que la création de cet Etat se soit effectuée, en 1948, aux dépens de la population arabe autochtone ne gêna pas outre mesure. La vague de la décolonisation en était encore à ses prémices, et ne constituait pas une donnée à prendre en compte. Israël était alors perçu comme un Etat-refuge pour les juifs errants, sans abri ni foyer.
Le fait que le sionisme ne soit pas parvenu à sauver les juifs d’Europe, et que les survivants aient souhaité émigrer en Amérique, et malgré la perception du sionisme comme étant une entreprise coloniale au plein sens du terme, n’altèrent pas une donnée significative : le diagnostic sioniste concernant le danger qui planait sur la vie des juifs dans la civilisation européenne du vingtième siècle (nullement judéo-chrétienne !), s’était avéré exact. Théodore Herzl, le penseur de l’idée sioniste, avait, mieux que les libéraux et les marxistes, compris les judéophobes de son époque.
Cela ne justifie pas, pour autant, la définition sioniste selon laquelle les juifs forment un peuple-race. Cela ne justifie pas davantage la vision des sionistes décrétant que la Terre Sainte constitue la patrie nationale sur laquelle ils auraient des droits historiques. Les sionistes ont, cependant, créé un fait accompli politique, et toute tentative de l’effacer se traduirait par de nouvelles tragédies dont seront victimes les deux peuples qui en ont résulté : les Israéliens et les Palestiniens.
Il faut en même temps se souvenir et le rappeler : si tous les sionistes ne réclament pas la poursuite de la domination sur les territoires conquis en 1967, et si nombre d’entre-eux ne se sentent pas à l’aise avec le régime d’apartheid qu’Israël y exerce depuis 52 ans, tout un chacun qui se définit comme sioniste s’obstine à voir en Israël, au moins dans ses frontières de 1967, l’Etat des juifs du monde entier, et non pas une République pour tous les israéliens, dont un quart ne sont pas considérés comme juifs, parmi lesquels 21% sont arabes.
Si une démocratie est fondamentalement un Etat aspirant au bien-être de tous ses citoyens, de tous ses contribuables, de tous les enfants qui y naissent, Israël, par-delà le pluralisme politique existant, est, en réalité, une véritable ethnocratie, à l’instar de ce qu’étaient la Pologne, la Hongrie, et d’autres Etats d’Europe de l’Est, avant la seconde guerre mondiale.
La tentative du président français Emmanuel Macron et de son parti visant aujourd’hui à criminaliser l’antisionisme comme une forme de l’antisémitisme s’apparente à une manœuvre cynique et manipulatoire. Si l’antisionisme devenait une infraction pénale, je recommanderais à Emmanuel Macron de faire condamner, à titre rétroactif, lebundiste Marek Edelman, qui fut l’un des dirigeants du ghetto de Varsovie et totalement antisioniste. Il pourrait aussi convier au procès les communistes antisionistes qui, plutôt que d’émigrer en Palestine, ont choisi de lutter, les armes à la main, contre le nazisme, ce qui leur a valu de figurer sur « l’affiche rouge ».
S’il entend faire preuve de cohérence dans la condamnation rétroactive de toutes les critiques du sionisme, Emmanuel Macron devra y joindre ma professeure Madeleine Rebérioux, qui présida la Ligue des Droits de l’Homme, mon autre professeur et ami : Pierre Vidal-Naquet, et aussi, bien évidemment : Éric Hobsbawm, Edouard Saïd, et bien d’autres éminentes figures, aujourd’hui décédées, mais dont les écrits font encore autorité.
Si Emmanuel Macron souhaite s’en tenir à une loi réprimant les antisionistes encore en vie, la dite-future loi devra aussi s’appliquer aux juifs orthodoxes de Paris et de New-York qui récusent le sionisme, à Naomi Klein, Judith Butler, Noam Chomsky, et à bien d’autres humanistes universalistes, en France et en Europe, qui s’auto-identifient comme juifs tout en s’affirmant antisionistes.
On trouvera, bien évidemment, nombre d’idiots à la fois antisionistes et judéophobes, de même qu’il ne manque pas de pro-sionistes imbéciles, judéophobes aussi, pour souhaiter que les juifs quittent la France et émigrent vers l’Etat d’Israël. Faudra-t-il les inclure également dans cette grande envolée judiciaire ? Prenez garde, Monsieur le Président, à ne pas vous laisser entraîner dans ce cycle infernal, au moment précis où la popularité décline !
Pour conclure, je ne pense pas qu’il y ait une montée significative de l’antijudaïsme en France. Celui-ci a toujours existé, et je crains, hélas, qu’il n’ait encore de beaux jours devant lui. Je n’ai, toutefois, aucun doute sur le fait que l’un des facteurs qui l’empêche de régresser, notamment dans certains quartiers où vivent des gens issus de l’immigration, est précisément la politique pratiquée par Israël à l’encontre des Palestiniens : ceux qui vivent, comme citoyens de deuxième catégorie, à l’intérieur de « l’Etat juif », et ceux qui, depuis 52 ans, subissent une occupation militaire et une colonisation brutales.
Faisant partie de ceux qui protestent contre cette situation tragique, je soutiens de toutes mes forces la reconnaissance du droit à l’autodétermination des Palestiniens, et je suis partisan de la « désionisation » de l’Etat d’Israël. Devrai-je, dans ce cas, redouter que ma prochaine visite en France, ne m’envoie devant un tribunal ?
Traduit de l’hébreu par Michel Bilis Le Club est l'espace de libre expression des abonnés de Mediapart. Ses contenus n'engagent pas la rédaction.
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Voici encore une réflexion pertinente pour mieux comprendre les enjeux dans ce domaine. Le 22 juin 2018, le journaliste bénévole Michel Collon, retraité et donc libre d'épées de Damoclès alimentaires, développait pendant 15 minutes le sujet...
Un programme très discret du gouvernement et de l’armée. Des dizaines de millions de dollars. Des experts sans scrupules. Plusieurs milliers de jeunes soldats et étudiants fanatisés. Leur mission : inonder Internet en permanence, manipuler Wikipedia, censurer Youtube, trafiquer Google.
L'enjeu : vous ! Contrôler vos infos et donc votre opinion. En réalité, les calomnies ne tombent pas du ciel, c’est une arme pour discréditer et empêcher le véritable débat. Une première enquête de Michel Collon. Basée sur des documents israéliens.
Parce que nous sommes décidés à lancer l’alerte. Il faut contrer cette campagne de désinformation massive salissant les personnalités qui soutiennent la cause palestinienne. Il faut défendre la liberté d’expression et de critique du colonialisme ! Merci pour votre soutien !
http://dons.michelcollon.info/fr
Investig’Action est un collectif fondé par Michel Collon en 2004. Il regroupe des journalistes, des écrivains, des vidéastes, des traducteurs, des graphistes et toute une série d’autres personnes qui travaillent au développement de l’info alternative. Parce qu’on ne peut laisser des médias dominés par la logique marchande monopoliser l’information sur les guerres, l’économie et les rapports Nord-Sud, Investig’Action milite pour donner la parole aux sans-voix.
(...)
Convaincu que la presse mainstream ne peut être réformée même si des journalistes courageux y font ce qu’ils peuvent, Michel décide de fonder Investig’Action avec l’idée que le rôle des citoyens est essentiel pour garantir le droit à l’info. Aujourd’hui, le collectif peut donc compter sur le soutien de centaines de bénévoles : journalistes professionnels, correspondants, capteurs de bonnes infos, traducteurs, diffuseurs, graphistes, écrivains, dessinateurs, correcteurs, étudiants, informaticiens…
________________________________ Mise à jour du 7 mars 2019 :
Voici encore un témoignage qui me semble intéressant à ce sujet :
(...) Le député Sylvain Maillard vient de proposer un projet de loi [visant à pénaliser non pas les propos racistes (ils le sont déjà dans plusieurs lois), mais ce qu'ils appellent des propos antisionistes], et affirme : « On a le droit de critiquer le gouvernement israélien, mais pas de remettre en question le droit de l'État [d'Israël] d'exister. Personne ne remet en question le droit à l'existence de la France ou de l'Allemagne. » Doublement faux : contrairement à la France ou à l'Allemagne, l'État d'Israël est le produit d'une colonisation, et nombreux ont été les États colonialistes dont on a refusé la légitimité (la Rhodésie ou l'Afrique du Sud, pour ne donner que deux exemples). De même que l'existence ne fait pas le droit, la non-existence ne signifie pas l'absence du droit à exister, comme l'ont montré le sort de dizaines d'États colonisés qui sont devenus souverains.
Deuxième erreur : l'antisionisme est originellement une idéologie juive et pas une invention d'islamo-gauchistes. Quand, au tournant du XXe siècle, le sionisme a vu le jour, l'immense majorité des Juifs s'y étaient opposés : les religieux pour des raisons théologiques, le mouvement ouvrier juif (en particulier le Bund) par socialisme... et les Juifs bourgeois d'Europe occidentale par peur de perdre leurs droits civiques.
L'antisémitisme est une forme de racisme et doit être combattu sans répit —d'autant plus qu'en Europe et aux États-Unis, il relève la tête, ou plutôt, sort au grand jour. L'antisionisme, lui, est une opinion politique, la forme spécifique de l'anticolonialisme en Palestine-Israël. Cette opinion n'est pas seulement légitime ; de mon point de vue, elle est juste. Quand Emmanuel Macron avait, en 2017, fait l'amalgame, il voulait caresser les dirigeants du Crif dans le sens du poil. Quand Sylvain Maillard propose son projet de loi, il veut dédouaner les dirigeants israéliens du véritable problème de ces dernières années : leur tentative de renforcer un front des États européens d'extrême droite (Hongrie, Pologne, Slovaquie, etc.) et semi-totalitaires, pour affaiblir la « vieille Europe. », attachée à une certaine conception du droit et des droits et donc critique face à la politique plus raciste que jamais de Benyamin Netanyahou.
Michel Warschawski inSiné Mensuel nº 84, mars 2019, page 25.
________________________________ Mise à jour du 10 mars 2019 :
...dont on parle plutôt peu. Car loin du psittacisme médiatique, il y a bon nombre d'événements qui nous interpellent autrement dont on ne parle que peu ou sous l'angle de la propagande unique. Nous essayons de repérer et de glaner des faits/sujets/positions en dehors de l'actu ou de l'éditocratie.
Voici notre cinquième sommaire de cette année scolaire, celui correspondant au 20 février 2019.
Et merci à mes élèves pour leurs contributions !
Voici quelques bribes extraites de notre journal :
Des véhicules blindés et des munitions fournis par la France sont au cœur de la répression sanglante des manifestations en 2013.
Des centaines de véhicules blindés, des navires de guerre, des machines à produire des munitions et même le fleuron de la production militaire française, l’avion de chasse Rafale. Nul inventaire à la Prévert, mais l’impressionnante liste des armes vendues par la #France à l’Égypte depuis 2012.
Une bien belle hypocrisie pour un pays qui a signé, ratifié et même promu des textes internationaux pour le contrôle des #armes. Retour sur une enquête de longue haleine dans ce nouvel épisode d’ « Eclairage ».
Présentation :
Sarah Roussel – chargé de campagne, Amnesty International France.
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Les gens de biens ont toujours soif, ils ne parviennent jamais à se désaltérer, et dans le courant de cette onde ultralibérale bien corrompue, ils font des progrès dans la privatisation de l'eau potable ou ont raflé sa gestion et sa distribution dans trop de municipalités, depuis quelques décennies, grâce aux services rendus par leurs subalternes (la plupart des élus) et quelques gogos (ahhh, la fraude innocente !) à l'échelle des communes, en ce qui concerne la France. Que le passage au robinet de tout un chacun nous rapporte des profits, que la soif des autres nous donne à trinquer, serait leur devise. Et ils se lâchent sans gêne par-dessus le marché, n'est-ce lé ? Vivement qu'ils mettent de l'eau dans leur vin !
Donc, un peu partout, au lieu de participer à la gestion de la flotte et de ses infrastructures, de veiller à leurs bons maintien, qualité et sécurité, et d'éviter les fuites de toutes les liquidités, les citoyens assistent à la déchéance du service, à la dégradation de la qualité du précieux liquide dans les réseaux (contaminée parfois à un niveau criminel) et à la détérioration de leurs infrastructures d'alimentation en eau. En échange, ils écopent de factures peu potables et bien salées destinées à engraisser des actionnaires et des directeurs financiers ou commerciaux et autres cadres.
Disons en passant qu'en France, il existe une association si hardie qu'elle ose troubler ce breuvage aux dividendes, persuadée que...
Parce que l’Eau n’est pas une marchandise mais un Bien Commun, il est
urgent de s’emparer de notre ressource de manière citoyenne et
participative.
Elle s'appelle Eau Bien Commun.AuRA et prône donc une gestion publique et citoyenne de l'eau et de son assainissement. Selon elle, l'eau en régie publique serait de 10 à 40% moins chère. En plus, elle ne réalise pas de bénéfices : quand il y en a, elle allège les factures ou réinvestit dans le réseau.
J'en ai entendu parler grâce à Léa Gasquet qui s'est penché sur le sujet dans le Siné Mensuel nº 83, de février 2019 (pages 10-12). Voici un extrait éclairant de son reportage :
(...) Anne Le Strat, cheville ouvrière de la remunicipalisation de l'eau à Paris, complète la démonstration : « Le vrai scandale est moins "combien on paie" que "qu'est-ce qu'on paie". Une entreprise privée doit dégager rapidement des profits pour ses actionnaires. En régie, c'est l'intérêt public qui prime. Cela passe par une vision à long terme, des investissements pour une gestion patrimoniale des infrastructures, et des actions en faveur de la préservation des ressources en eau. » La régie Eau de Paris, comme celle de Lons-le-Saunier dans le Jura, travaille avec les agriculteurs proches de ses zones de captage pour encourager les conversions en bio et protéger les nappes phréatiques des contaminations aux pesticides. Logique ! Rendre potable une eau peu polluée revient aussi moins cher. À Strasbourg ou à Grenoble, l'eau n'est même plus traitée avant d'arriver au robinet.
Avant d'en venir là, il s'agit de rattraper les dégâts. À Montpellier, Thierry Uso, de l'association Eau secours 34, s'est battu pour le retour en régie publique de la métropole et fait désormais partie du conseil d'administration : « On avait calculé que l'on pourrait baisser de 40% le prix de l'eau par rapport à l'ancienne société privée. Mais vu l'état des canalisations, on a décidé de ne le baisser que de 10% et de consacrer le reste aux investissements. Sans quoi, ce sont les générations suivantes qui paieront le prix fort. » Pratique courante à l'époque et interdite depuis, pour obtenir le marché en 1989, Veolia a versé un droit d'entrée à la mairie de Georges Frêche de 250 millions de francs. Ce « cadeau » était en réalité un prêt assorti d'un taux d'intérêt de 7,5% par an. D'après les calculs de l'association, l'entreprise s'est remboursée trois fois. À ce prix, on s'imagine des canalisations en plaqué or ! Pensez-vous... « Au rythme où allaient les travaux, il aurait fallu trois cents ans pour tout réparer. Or la durée de vie d'une canalisation est de cinquante à quatre-vingts ans. Au-delà, ça pète ou ça fuit ! » pointe Thierry Uso. Alors que le Grenelle II fixe comme objectif national un taux de fuite maximum de 15%, à Nîmes, où opère la Saur, 30% de l'eau produite se perd dans les sous-sols. À Évreux (Suez), c'est presque 40%. Et la palme revient ironiquement à Capesterre-Belle-Eau, en Guadeloupe, où Veolia a eu la mainmise pendant des décennies : 70% de taux de fuite ! » (...)
La France doit en finir avec les violences faites aux manifestants, en bannissant les armes mutilantes et en s'inspirant des méthodes de médiation mises en place dans plusieurs pays européens. Analyse et propositions avec Marie-Christine Vergiat (GUE-GVN) et Christine Revault d'Allonnes-Bonnefoy (S et D).
J'ai eu vent de ce nouveau film sur mai 68 grâce à une critique du metteur en scène et comédien Philippe Person, publiée par le numéro de février 2019 du Monde diplomatique (page 26). Il nous apprend que les réalisateurs ont ajouté au matériel qu'ils avaient filmé à l'époque « d'autres témoignages majeurs issus des films de William Klein, de Jean-Pierre Thorn, des groupes Medvedkine, etc. ». [À propos du film de Klein Grands soirs et petits matins, cliquez ci-contre].
Voici la bande-annonce des Révoltés :
Ouvriers, étudiants et jeunes s’opposent, en mai 1968, à la morale et au pouvoir en place. Les facultés et les usines sont occupées. Les barricades sont dressées. Les pavés sont lancés. La parole cède la place aux actes. C’est l’affrontement. Ces images nous plongent au coeur des évènements et témoignent des hommes et des femmes qui, indignés jusque-là, marchent vers leur révolution.
L'ouvrier qui s'exprime à la fin de cette bande-annonce dit exactement :
« Ça ne suffit pas, tout ça... Il faut voir plus loin, et le plus loin, pour moi, c'est une société humaine, et non une société de machines, une société de profits, une société totalement capitaliste. »