Un exemple (à travers une simple revue de presse). Un bon exemple d'une bonne vieille obscénité au sujet de laquelle le cynisme nous rassure. [Cf. Les nouveaux chiens de garde, le film et ses références.]
« Victoire de l’irresponsabilité », Emmanuel Macron invite à déjeuner, en toute discrétion et avec une facilité déconcertante, vertigineuse et non inédite, dix éditorialistes de la presse parisienne afin de leur insuffler off the record un argumentaire de vente juste deux jours avant la journée d’action contre sa Réforme des Retraites, convoquée pour le jeudi 19 janvier. « A croire, si votre infolettre osait, que le chef de l’Etat s’est directement épanché auprès de nos confrères, histoire de faire passer quelques messages, sans caméras ni micros… », dixit l'Infolettre Politico du 18.01.2023.
Les copistes collabos en question avaient été choisis parmi les pantins préférés du Président des nababs, mérite dont jouissent Guillaume Tabard, du Figaro, Dominique Seux, de France Inter et des Échos, Françoise Fressoz, du Monde, ou encore Nathalie St-Cricq, de France Télévisions (chef du service politique de France 2). Qui est plus esclave qu'un courtisan assidu, si ce n'est un courtisan plus assidu ? se demandait rhétoriquement La Bruyère (De la Cour, 69, Les Caractères). Il y avait néanmoins une condition de taille pour assister au repas et aux confidences : les perroquets ne devraient jamais avouer qu’ils avaient vu Emmanuel Macron et, donc, ne pouvaient pas le citer (cf. Ève Roger, C médiatique, émission présentée par Mélanie Taravant sur France 5 diffusée le 22.01.2023 ; cf. CheckNews du Libé du 24.01.2023).
Donc, ô prodige, le même jour (le 17.01.2023 ou tôt le lendemain), malgré une façade présidentielle silencieuse (Cécile Cornudet, Les Échos), les « journalistes » ventriloqué.es ont trouvé la manière de colporter la bonne parole macronite bien calquée en tous indépendance et pluralisme : ici (Yaël Goosz, France Inter), ici (Matthieu Goar, Le Monde, qui venait tout juste de dénoncer le 5.01.2023, avec Ivanne Trippenbach et Claire Gatinois, « le Off,... une dérive politique » et les contorsions journalistiques concomitantes) ou là (Guillaume Tabard, Le Figaro, qui, à l'heure des alibis historiques, montre comme de l'eau de roche de quel bois se chauffe la lignée De Gaulle, Chirac, Sarkozy, etc.), ou là là (Benjamin Duhamel sur BFMTV). Ah l'entourage et les coulisses du donneur de ton (Raphaël Delvolvé, Europe 1, 18.01.2023). Complétaient la bouffe trois autres porte-parole de l'Élysée, à savoir, Alba Ventura (RTL), Stéphane Verbay (Ouest France) et David Revault d'Allonnes (rédacteur en chef politique au JDD). Ventura transmet le 18 : « À la veille de la journée de mobilisation contre la réforme des retraites, c’est la sérénité qui règne à l'Élysée. » « (...) avant une journée de mobilisation qui s'annonce massive, contre la réforme des retraites. Est-ce de nature à émouvoir Emmanuel Macron ? Non, le président de la République est droit dans ses bottes. Cette réforme il la veut. » « Emmanuel Macron dit souvent ces temps-ci qu’il ne croit pas à la victoire de l’irresponsabilité. » et tout le tralala qu'elle ressasse le lendemain tout en préservant les mots codés, les expressions totem de ces temps-ci.
Vis-à-vis de tant d’écholalie macronite (ils ont tous diffusé les mêmes éléments de langage, vous n'avez qu'à comparer), Tabard, manteau à court d’arguments, se couvre plutôt mal.
Ouhhh là, côté ou là là, l'esprit a du mal à s'affranchir d'une vague réminiscence, en rapport peut-être avec un pur hasard généalogique, car... la nièce par alliance de Nathalie St-Cricq est la ministre des Sports macronite Amélie Oudéa-Castéra [ce qui ne constitue en principe aucun problème], qui est cousine de Benjamin Duhamel, journaliste de service ou là là au service politique de BFMTV, fils de Patrice Duhamel, ex du Figaro et directeur général de France Télévisions, et de Nathalie Saint-Cricq, qui est elle-même donc la belle-sœur de l’incontournable journaliste indépendant, libre et pluriel Alain Duhamel.
Mais, parmi les cité.es, en matière de journalisme de révérence, « moi, mon colon, cell' que j'préfère, c’est » Françoise Fressoz, qui se produit d'ailleurs dans un journal de révérence. « La facilité déconcertante avec laquelle Emmanuel Macron mène campagne rend le moment à la fois inédit et vertigineux » avait-elle déjà pondéré une fois, elle, qui a consacré à Macron grand nombre d’autres alertes équilibrées, car le suryong renaissant prônant le Travail (des travailleurs) et l'All Predation for Good est un « capitaine Tempête » « protecteur de la nation », un « énarque pétri de philosophie », « une tête bien faite », un « flibustier », « préoccupé de justice sociale et désireux de vaincre cette "fatigue des démocraties" ». Voilà pourquoi elle est à même de nous rassurer : « personne n’est aujourd’hui en mesure de lui disputer le leadership, ni même simplement le partage du pouvoir. »
[Les adorateurs de Jupiter (ados) ont la possibilité d'accéder à des échantillons stupéfiants de l'ensemble de son œuvre sur machronique en marche en cliquant ci-contre]